Le projet propose une réflexion multidisciplinaire et ouverte à l'international sur la pertinence des indicateurs de richesse. Les indicateurs sont aujourd'hui au coeur des politiques publiques et la réflexion sur leur genèse, leurs usages et leur limites s'inscrit dans le projet «Argumenter, décider, agir» à la fois car ils sont de puissants outils de légitimation des décisions et parce qu'ils convoient des représentations particulières du monde.
Les 3 séances dont nous proposons la tenueà la MESHS apparaissent donc comme des préalables afin d'inciter à la construction, dans le Nord - Pas-de-Calais, d'un réseau de chercheurs, de praticiens et d'étudiants capables d'affronter les défis théoriques et les contraintes pratiques de l'utilisation d'indicateurs alternatifs.
La participation aux séminaires est libre dans la limite des places disponibles.
Pour toute question et si vous souhaitez vous inscrire préalablement : écrire à Paul Cary.
- Florence Jany-Catrice (Responsable)
Centre lillois d’études et de recherches sociologiques et économiques (CLERSE), - Paul Cary
Centre de Recherche Individus, Epreuves, Sociétés (CeRIES), - Frédéric Dumont
Territoires, villes, environnement et société (TVES), - Rabih Zotti
Centre lillois d’études et de recherches sociologiques et économiques (CLERSE), - Guillaume Schmitt
Territoires, villes, environnement et société (TVES), Université de Valenciennes et du Hainaut-Cambrésis (UVHC)
► Vendredi 29 mars 2013 | MESHS Lille, 9h30 - 16h30
Réflexions sur les indicateurs de richesse : une perspective critique internationale
Coordination : Paul Cary
Avec:
- Alain Caillé (Paris 10): Autour de l'idée de richesse ;
discussion : Isabelle Bruno (Lille 2)
- Florence Jany-Catrice (Lille 1): Faut-il défendre les indicateurs? ;
discussion : Jean-Michel Wachsberger (Lille 3)
- Paulo Henrique Martins (UFPE, Recife, Brésil): Modèle de développement et indicateurs au Brésil ;
discussion: Paul Cary (Lille 3)
► Vendredi 31 mai 2013 | MESHS Lille, 9h30 - 16h30
Territorialiser les indicateurs
Coordination: Frédéric Dumont
Avec:
- Bernard Bret (Lyon 3): Injustices spatiales ;
discussion : Frédéric Dumont (Lille 1)
- Vincent Froger (Mission Bassin Minier) : Mesure des impacts en termes de développement humain d'un grand équipement culturel, le projet Louvre-Lens et les politiques mises en place ;
discussion : Guillaume Schmitt (Université de Valenciennes)
- Rabih Zotti (Lille 1): Retour sur la genèse de l'Indicateur de santé sociale ;
discussion : Grégory Marlier (Attaché, Conseil régional
► Vendredi 18 octobre 2013 | MESHS Lille, 9h30 - 12h30
Mettre en réseau les chercheurs régionaux sur la richesse
Coordination: Florence Jany-Catrice
Réunion de débats et d'élaboration de projets communs (réponse à appels d'offre, publications, collaborations) autour de la thématique de la richesse dans la Région, incluant des acteurs universitaires mais également des organismes publics et associatifs.
Le projet « Les indicateurs de richesse enrichissent-ils la réflexion ? », coordonné par Florence Jany-Catrice, (économie, CLERSE), Paul Cary (sociologie, CERIES) et Frédéric Dumont (géographie, TVES) propose une réflexion multidisciplinaire et ouverte à l'international sur la pertinence des indicateurs de richesse. Les indicateurs sont aujourd'hui au coeur des politiques publiques et la réflexion sur leur genèse, leurs usages et leur limites s'inscrit dans le projet « Argumenter, Décider, Agir » à la fois car ils sont de puissants outils de légitimation des décisions et parce qu'ils convoient des représentations particulières du monde.
La question de la richesse est au coeur de toute l'histoire de l'économie politique et de la science économique. Elle porte en elle de manière implicite ou explicite la question de la « valeur » (valeur travail, valeur des biens et services échangés etc.). De nombreux auteurs contemporains, venus de champs disciplinaires variés, ont exploré la question de la « richesse » en tentant de renouveler ses frontières et son contenu (Sen, Méda, Viveret, Caillé etc.). Ils l'ont souvent fait en repartant de la genèse des indicateurs qui portent justement la vision dominante de la richesse, telle que contenue dans le « produit intérieur brut » (PIB).
Face à l'hégémonie du PIB dans les jugements collectifs de ce qu'est la richesse, et de celle de la croissance économique dans les jugements du progrès, de nombreuses initiatives se sont multipliées depuis les années 1990 (Gadrey, Jany-Catrice, 2005, 2012). Elles visent parfois à corriger le PIB en l'ajustant de « productions » que les conventions de calcul du PIB ignorent (bénévolat, travail domestique), et en tenant compte d'externalités négatives qu'elle ne compte pas (dégradation de l'air, épuisement des ressources fossiles, surexploitation de la biodiversité). C'est le cas de la famille des « PIB verts » par exemple. D'autres initiatives complètent le PIB d'indicateurs plus sociaux, en vue d'ajuster la vision que celui-ci exprime (c'est le cas de l'IDH du programme des nations unies, ou des Indicateurs de Santé Sociale régionaux français, promus par la région Nord - Pas-de-Calais).
La question est souvent posée de savoir sur quels fondements faire porter ces conventions statistiques qui comportent inévitablement des choix, des arbitrages, voire une part de bricolage. Pour l'exprimer autrement, c'est la question de la légitimation de ces nouvelles initiatives qui est alors posée. Les experts mobilisés tendent à proposer des indicateurs qui sont compatibles avec leur outillage intellectuels (les économistes auront ainsi une forte propension à développer des évaluations monétarisées). Des initiatives récentes s'appuient galement sur des démarches qu'elles nomment « participatives ». Ainsi, l'OCDE propose une approche s'appuyant sur une consultation de vaste ampleur qu'elle a organisée par le biais d'Internet et ouverte « à tous » : les citoyens ont été invités à donner leur avis, et peuvent désormais faire varier les différentes pondérations qui servent à construire l'indicateur du « vivre-mieux ». Enfin, les indicateurs permettent également de souligner les différences entre territoires et appuient des revendications de justice spatiale.
La multiplication de ce type d'indicateurs, les méthodes retenues (monétarisation, indicateurs composites etc.), et la manière de les construire (les méthodes « participatives », le volet subjectif du bien-être), ne sont pas sans poser un certain nombre de difficultés.
D'abord, la prise en compte de dimensions non marchandes va parfois de pair avec une monétarisation de celles-ci. L'économie de l'environnement, souvent appelée à la rescousse dans la construction de ces indicateurs, s'appuie sur des prix fictifs (puisque la « nature » et les services qu'ils rendent n'ont souvent pas de prix) à partir de valeurs monétaires construites. Celles-ci sont élaborées à partir d'estimations des gains et pertes écologiques. Le problème est qu'en raisonnant ainsi, l'idée est véhiculée d'une compensation monétaire (toujours) possible de la dégradation de l'environnement (l'Equateur a ainsi récemment demandé des compensations financières à la communauté internationale pour ne pas exploiter un gisement de pétrole).
Ensuite, l'émergence d'indicateurs complémentaires ou substitutifs au PIB ne fournit pas nécessairement des visions renouvelées de la situation sociale et environnementale. Ainsi l'indice que l'OCDE a élaboré lui permet d'affirmer que : « le bien-être a augmenté en moyenne au cours des quinze dernières années : les gens sont plus riches et plus susceptibles d'être employés ; ils bénéficient de conditions de logement de meilleure qualité et sont exposés à des niveaux de pollution inférieurs ; ils vivent plus longtemps et sont plus instruits ; ils sont également exposés à moins de crimes », contre toutes les évidences en matière environnementale, par exemple.
Enfin, ces nouveaux indicateurs sont des moyens de justifier des politiques économiques et environnementales qui ne permettent pas d'envisager une soutenabilité forte. C'est notamment le cas dans les pays du Sud et particulièrement au Brésil.
Le projet « Les indicateurs de richesse enrichissent-ils la réflexion ? » propose d'affronter ces défis dans un cadre interdisciplinaire qui mobilisera sociologues, économistes et géographes. De même, le projet privilégie une réflexion à l'échelle internationale : il s'agit de « provincialiser l'Europe » (Chakrabarty, 2000) en mettant en perspective la façon dont la France et le Brésil, qui connaissent aujourd'hui des situations particulièrement contrastées en matière de développement économique, affrontent la question des (nouveaux) indicateurs. Enfin, il s'agit de relever un défi pratique : comment spatialiser les indicateurs alternatifs de façon efficace afin que les responsables publics puissent s'en saisir, notamment dans le Nord - Pas-de-Calais, où ces indicateurs existent et peuvent faire l'objet de traitements statistiques. Les 3 séances dont nous proposons la tenue à la MESHS apparaissent donc comme des préalables afin d'inciter à la construction, dans le Nord - Pas-de-Calais, d'un réseau de chercheurs, de praticiens et d'étudiants capables d'affronter les défis théoriques et les contraintes pratiques de l'utilisation d'indicateurs alternatifs.
La première séance, intitulée « Réflexions sur les indicateurs de richesse : une perspective critique internationale », coordonnée par Paul Cary, s'interrogera sur la prolifération des indicateurs de richesse (orthodoxes ou alternatifs) et leurs usages politiques et sociaux. Un dialogue fécond devrait s'instaurer entre Alain Caillé (Professeur émérite de sociologie), qui a récemment souligné les impasses d'une approche de la mesure d'une « autre » richesse ; aulo Henrique Martins (Professeur de sociologie à l'Université Fédérale du Pernambouc, président de l'Association Latino-Américaine de Sociologie), qui présentera un regard critique sur les politiques publiques contemporaines au Brésil, fondées sur une évaluation permanente qui ne retient que les dimensions économiques et quantitatives au détriment des liens sociaux et de la qualité de l'environnement ; et Florence Jany-Catrice, qui défend jusqu'à un certain point l'émergence d'indicateurs alternatifs de richesse. Au fond, face à l'émergence de multiples indicateurs dans tous les domaines, il s'agira de se demander si les indicateurs alternatifs ne viennent pas aujourd'hui s'inscrire dans un paradigme de la mesure généralisée.
La deuxième séance, intitulée « Construire et territorialiser les indicateurs de richesse », coordonnée par Frédéric Dumont, s'intéressera à la construction et aux usages des indicateurs, ainsi qu'aux questions d'échelle liées à leur spatialisation. Elle permettra de renforcer des liens entre monde universitaire et monde politique. Bernard Bret, professeur émérite de géographie, reviendra sur la prise en compte des données non économiques dans la réflexion sur la justice spatiale. Deux interventions seront ensuite consacrées à la façon dont ont été mis en place des indicateurs qui intéressent spécifiquement la région Nord - Pas-de-Calais. Rabih Zotti (Clersé, doctorant) reviendra sur la genèse de l'Indice de Santé Sociale, ce qui permettra aussi aux pouvoirs publics de présenter leur expérience à ce propos : Grégory Marlier, de la direction prospective et évaluation du Conseil Régional, exposera ainsi son point de vue sur cet indicateur. Enfin, Vincent Froger, Directeur d'études, Observation - Prospective à la Mission Bassin Minier Nord - Pas-de-Calais) présentera la démarche d'évaluation proposée à Euralens sur la mesure des impacts en termes de développement humain, du Louvre-Lens et des politiques qui y sont associées.
La troisième séance, intitulée « Mettre en réseau les chercheurs régionaux sur la richesse », coordonnée par Florence Jany-Catrice, sera l'occasion de faire le point sur la dynamique lancée par le séminaire. Elle réunira les différents participants, dans le but de donner des suites, que ce soit par la réponse à des appels d'offre, par le renforcement de collaborations scientifiques, notamment internationales, ou encore par la mise en réseau des chercheurs autour de cette question des indicateurs dans la région.
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