Les techniques numériques occupent une place privilégiée dans les recherches scientifiques sur les phénomènes mentaux. À la suite des premiers travaux de Turing, les chercheurs en sciences cognitives ont massivement adopté l'idée que l'esprit pouvait adéquatement être comparé à un logiciel dans le cerveau et que le fonctionnement du cerveau pouvait être pensé sur le modèle des ordinateurs. Nombreux sont pourtant ceux qui soupçonnent aujourd'hui qu'un tel « paradigme computationnel » laisse quelque chose de côté. Ils proposent d'abandonner la comparaison de l'intelligence humaine à celle d'un ordinateur et de prendre au sérieux l'idée qu'elle est un phénomène essentiellement biologique.
L'abandon du modèle computationnel n'exclurait pourtant pas les techniques numériques des laboratoires qui étudient l'esprit humain. Indépendamment de la manière dont on se représente le fonctionnement de l'esprit, on sait aujourd'hui repérer des corrélations entre les activations cérébrales d'un sujet et certaines de ses pensées ou des ses actions à venir. Si elles ont déjà des applications thérapeutiques impressionnantes, ces techniques de détection de pensée menacent de bouleverser notre rapport à l'intimité psychique et posent des problèmes éthiques fondamentaux.
- Jean-Michel Roy, Maître de conférences en philosophie à l'ENS-LSH, Lyon.
- Laurent Pézard, Professeur de neurosciences à l'Université de Provence (laboratoire de neurosciences intégratives et adaptatives, LNIA).
Séance introduite et menée par Alexandre Billon, Maître de conférences en philosophie à l'Université Lille 3 (laboratoire STL).
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