Ce séminaire entend encourager les échanges interdisciplinaires autour de la question du travail : principalement entre politistes et sociologues - en premier lieu des laboratoires lillois (CERAPS et CLERSE) où ils sont investis -, mais en se confrontant également aux approches des économistes, des juristes, des historiens, des psychosociologues. L'objectif est de clarifier les usages de la catégorie « travail » et repérer les zones où la sociologie et la science politique peuvent s'en saisir ensemble. En nous appuyant sur la polysémie de la notion de représentation (comme activité, comme groupe, comme schème de pensée et d'action), il s'agira de réfléchir à la construction sociale et historique de la catégorie « travail ». On se concentrera sur l'une de ses représentations instituées : le syndicalisme, pour réfléchir aux modalités par lesquelles celui-ci répond à ce qu'il est convenu d'identifier comme sa crise. On travaillera ensuite à la façon dont le travail peut être mobilisé au regard de ce contexte particulier : mobilisé comme catégorie d'analyse pour rendre compte des pratiques militantes ; mobilisé comme concept descriptif sur le terrain duquel se reproduit ou s'ébranle l'ordre social ; mobilisé comme « cause » et comme support de subjectivations politiques.
Il était encore de bon ton de méditer, dans les années 1990, sur une éventuelle « fin du travail ». C'est au contraire sous la forme d'un fait social bien vivace que le travail a, ces dernières années, réinvesti la scène publique. Le candidat élu à la Présidence de la République française le fut à l'issue d'une campagne où il s'était fixé comme mission de réhabiliter la « valeur travail ». Si le sens mis derrière cette formule varie selon qui l'emploie, une enquête récente a souligné l'importance du travail comme dimension du bonheur (Baudelot et al., 2003). La transition du RMI (revenu minimum d'insertion) vers le RSA (revenu de solidarité active) traduit dans les dispositifs d'action publique cette redécouverte de l'idée d'intégration par le travail, et avec elle, le risque qu'à la catégorie d'« exclu » se substitue celle de « travailleur pauvre » (Maurin, Savidan, 2008). Face à la crise économique et sociale, et malgré la faiblesse numérique qui continue de les caractériser, les organisations syndicales ont été au coeur de l'actualité politique pendant les six premiers mois de 2009, mobilisant des centaines de milliers de travailleurs. Dans le même temps, une réforme longtemps annoncée des règles de la représentativité est entrée en vigueur qui pourrait, à terme, bouleverser en profondeur le champ syndical. De multiples manières, le travail redevient objet de préoccupation politique. Ses mises en forme et ses usages, ses invocations et les façons de parler en son nom sont au coeur des procès de transformation, d'ébranlement et de légitimation d'un ordre social et politique dans l'édification duquel les références au travail et à la nation avaient noué des liens étroits (Didry et al., 1999).
Pourtant, poussée à la spécialisation par une reconnaissance maintenant ancienne, la sociologie du travail a pu être conduite à laisser de côté les implications politiques de son objet. Parallèlement, la science politique s'est longtemps désintéressée du travail, l'abandonnant à ses spécialistes. L'objectif de ce séminaire est d'encourager les échanges interdisciplinaires autour de la question du travail : principalement entre politistes et sociologues - en premier lieu des laboratoires lillois (CERAPS et CLERSE) où ils sont investis -, mais en se confrontant également aux approches des économistes, des juristes, des historiens, des psychosociologues. Il s'agirait, ce faisant, d'encourager un processus récemment entamé de décloisonnement entre la sociologie du travail et la science politique. La constitution de l'équipe ANR « Formasynd », dont font partie les organisateurs de ce séminaire, en est d'ailleurs une illustration.
Par son omniprésence, la catégorie « travail » est pour les sociologues du travail un objet tellement vaste qu'elle renvoie à des pratiques et des problématiques de recherches extrêmement différentes. À l'inverse, pour les politistes, elle n'est qu'une catégorie périphérique, souvent peu explicitée. Le but de ce séminaire serait dès lors de clarifier les usages de la catégorie « travail » et repérer les zones où la sociologie et la science politique peuvent s'en saisir ensemble. Il s'agirait ainsi d'étudier comment le travail peut devenir objet politique, objet de science politique et comment la sociologie, et spécialement la sociologie du travail peut aider la science politique à comprendre cet objet.
Notre réflexion s'organisera selon un calendrier prévisionnel de six séminaires. En nous appuyant sur la polysémie de la notion de représentation (comme activité, comme groupe, comme schème de pensée et d'action), il s'agira de réfléchir à la construction sociale et historique de la catégorie « travail ». On se concentrera sur l'une de ses représentations instituées : le syndicalisme, pour réfléchir aux modalités par lesquelles celui-ci répond à ce qu'il est convenu d'identifier comme sa crise. On travaillera ensuite à la façon dont le travail peut être mobilisé au regard de ce contexte particulier : mobilisé comme catégorie d'analyse pour rendre compte des pratiques militantes ; mobilisé comme concept descriptif sur le terrain duquel se reproduit ou s'ébranle l'ordre social ; mobilisé comme « cause » et comme support de subjectivations politiques.
Toutes les séances se dérouleront de 14h à 17h,à la Maison Européenne des Sciences de l'Homme et de la Société Lille Nord-de-France
2, rue des Canonniers, 59000 Lille
Séminaire pluridisciplinaire organisé par Sophie Béroud (Université de Lyon 2, Triangle), Nathalie Ethuin (Université de Lille 2, CERAPS), Cécile Guillaume (Université de Lille 1, CLERSE), Yasmine Siblot (Université Paris 1, Friedmann), Karel Yon (Université Lille 2, CERAPS)
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