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e-monin[at]lille[POINT]archi[POINT]frParmi les différentes recherches qui font l'histoire de l'architecture, la question des représentations architecturales occupe aujourd'hui une place de plus en plus importante, en raison de la diversification des sources documentaires servant à réévaluer, à sa juste mesure, tous les aspects de la réception d'un art universel. En effet, bien audelà du microcosme savant au sein duquel se développe cette discipline, l'architecture concerne un très large public néophyte, et depuis longtemps, ses représentations ne sont plus cantonnées aux cabinets d'amateurs de dessins. « L'architecture et ses images » telles qu'elle étaient encore décrites par Gérard Monnier au tournant des années quatre-vingt-dix, dépassent largement la question de l'apport des nouvelles techniques de représentation dans les agences d'architecture du XXe siècle. Comme l'a souligné Ernst Gombrich dans L'Art et l'illusion, l'image et sa diffusion ont connu de grands bouleversements avec le développement de notre société de consommation et L'Histoire de l'emballage en France publiée par Denis Woronoff montre comment, dès la seconde moitié du XIXe siècle, le conditionnement des marchandises s'est illustré comme un important vecteur d'illustrations de toutes natures et en particulier architecturales. Servant tout d'abord à différencier les produits disposés sur les rayonnages des grands magasins, tout en célébrant les installations industrielles à partir desquels ces nouveaux produits étaient diffusés à grande échelle, les images d'architecture illustraient également la spécificité régionale d'un biscuit, d'un chocolat, d'une liqueur ou bien encore d'un vêtement.
En décidant de s'intéresser aux représentations architecturales imprimées sur les sacs plastique publicitaires depuis leur apparition dans les années cinquante, ce projet de recherche a permis d'exalter la valeur cachée d'un contenant aujourd'hui relégué au rang des pratiques aberrantes d'une période dénuée de conscience écologique. Le pochon plastique et ses images d'architecture raconte pourtant bien des histoires à celui qui sait l'observer attentivement. En effet, il expose à la fois efficacement et discrètement, les liens ténus qui se sont tissés entre une activité marchande et son contexte architectural, le tout concentré dans une image qui combine habilement adresses, références construites, raisons sociales et allusions subtiles à l'activité du boutiquier. Ces fragments de polyéthylène documentent tout un pan de l'activité des centres villes des années soixante à quatre vingt dix, en révélant également un certain regard sur l'architecture monumentale de ces lieux.
Dès le départ, le projet à permis d'entreprendre un travail de réflexion sur la diversité des sources documentaires pour l'histoire de l'architecture. Le corpus éclectique présenté sur ces supports décalés, constituait également l'occasion de s'adresser à un large public pour lui raconter des histoires d'architectures plus ou moins inattendues. Pour cela, une exposition fut organisée à partir d'une cinquantaine de sachets issus d'une collection particulière. Les spécimens retenus furent commentés par autant d'historiens spécialistes des édifices représentés et qui acceptèrent volontiers de se prêter au jeu en rédigeant des notices sérieuses, contenant parfois une touche d'humour adaptée aux situations rencontrées. Créée en 2014 à la Maison de l'architecture de Picardie, cette exposition a déjà voyagé dans trois autres villes françaises et ce périple, au cours duquel de nouveaux sachets viennent sensiblement augmenter la présentation initiale, ne fait que commencer.
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