Les « limites planétaires » sont les seuils et marges écologiques associés à neuf processus du système Terre, qu’il convient de ne pas dépasser pour le maintien d’un « espace sûr pour l’humanité ». Il s’agit : du changement climatique, de l’acidification des océans, de l’appauvrissement de la couche d’ozone, des aérosols atmosphériques, de la perturbation des cycles de l’eau et des usages de l’eau douce, de l’usage des sols, de l’érosion de la biodiversité, des perturbations globales du cycle de l’azote et du phosphore, et de l’introduction de nouvelles entités artificielles dans l’environnement (ou pollution chimique). Cinq de ces limites ont déjà été dépassées au niveau mondial, provoquant de plus en plus de catastrophes aux conséquences tragiques et irréversibles pour le Vivant.
D’après les deux articles fondateurs du concept de « limites planétaires » (Rockström et al. 2009 ; Steffen et al. 2015), la responsabilité des activités humaines dans le franchissement de ces seuils est majeure, ce qui illustre le passage de l’ère de l’Holocène à l’Anthropocène. Partant, les limites fixées par la trentaine d’auteurs de ces articles apparaissent comme des horizons indépassables que les politiques publiques doivent prendre en compte. Se pose alors la question de l’encadrement juridique de ces limites, ainsi que du rôle et de la capacité du droit à saisir des phénomènes écologiques.
La question se fait d’autant plus prégnante que la notion de « limites planétaires » fait déjà l’objet d’une forte reconnaissance dans la littérature scientifique et auprès des décideurs politiques et citoyens. En France, la Convention citoyenne pour le climat a souhaité l’introduire (sans succès) en combinaison avec le concept d’écocide dans la loi du 24 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. La Fondation pour la nature et l’homme a même proposé en 2018 son intégration dans la Constitution. Rappelons d'ailleurs que le concept fait déjà partie de notre droit positif depuis 2020 (loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire), à l’article L110-1-1 du Code de l'environnement. Enfin, le rapport 2019 sur l’état de l’environnement en France, publié par le Ministère de la transition écologique a réalisé, pour la première fois, une évaluation qui reprend les limites planétaires. Il y apparaît que la France a déjà franchi six seuils.
Le colloque aborde ainsi les neuf limites à partir du droit positif pour faire le point sur le cadre juridique actuel et la protection qu’il accorde aux processus écologiques étudiés. Comment le droit national prend-il en compte des préconisations scientifiques, de surcroît lorsqu’elles sont déterminées pour l’échelle globale ? Comment évolue-t-il ? Quels sont, à ce jour, les seuils et marges que le droit français fixe ? La protection de l’environnement dans ces neuf domaines se fait-elle par d’autres types de dispositifs que des « limites » ? Comment sanctionne-t-on les dépassements ? Quelles perspectives d’évolution du droit face à l’urgence écologique ? Cette liste non-exhaustive de questions illustre l’ampleur du défi auquel sont confrontées nos organisations sociales face à la catastrophe écologique et en particulier nos ordres juridiques.
PROGRAMME
SESSION I – INTRODUCTION
Modératrice : Magali DREYFUS , Chargée de recherche en droit CNRS, CERAPS – Univ. Lille
13h30
Allocutions d’ouverture :
Anne-Cécile DOUILLET , Directrice du CERAPS, Professeure de Science Politique – Univ. Lille
Magali DREYFUS , Chargée de recherche en droit CNRS, CERAPS – Univ. Lille
14h
1 – Propos introductifs : Eve TRUILHE et Sandrine M ALJEAN -DUBOIS , Directrices de recherche CNRS, CERIC – Univ. Aix-Marseille
14h30
2 – La notion de seuil/limite en droit : Philippe BILLET , Professeur de droit public, IDE – Univ. Jean Moulin Lyon 3
15h-15h20 – Pause
SESSION II – LES PROCESSUS GLOBAUX IMPACTANT L’EQUILIBRE DU SYSTEME TERRESTRE
Modérateur : Grégory SALLE , Directeur de recherche en sociologie CNRS, CLERSE – Univ. Lille
15h20
3 – Le changement climatique : Marta TORRE -S CHAUB , Directrice de recherche CNRS, ISJPS – Univ. Paris I Panthéon-Sorbonne
15h50
4 – L’acidification des océans : Pascale RICARD , Chargée de recherche en droit CNRS, CERIC – Univ. Aix Marseille
16h20
5 – L’érosion de la couche d’ozone stratosphérique : Romain GOSSE , chercheur postdoctoral, LARSH – Univ. Polytechnique Hauts-de-France
16h50-17h30 – Discussion
SESSION III – LES PROCESSUS AUX IMPACTS REGIONAUX
Modérateur : Romain GOSSE , chercheur postdoctoral, LARSH – UPHF
9h30
6 – L’érosion de la biodiversité : Marthe LUCAS , Maîtresse de conférences en droit, IMBE – Univ. Avignon10h
7 – La perturbation des cycles biogéochimiques de l’azote et du phosphore : Alexandra LANGLAIS , Directrice de recherche CNRS, IODE – Univ. Rennes
10h30-10h50 – Pause
10h50
8 – L’usage des sols : Maylis DESROUSSEAUX , Maîtresse de conférences en droit, Conservatoire National des Arts et Métiers – Le Mans
11h20
9 – La perturbation des cycles de l’eau/usage de l’eau douce : Renaud BRAILLET , doctorant en droit – Univ. Paris Saclay
11h50-12h30 – Discussion
12h30-14h10 – Pause méridienne
SESSION IV – LES PROCESSUS AUX LIMITES ENCORE INDETERMINEES
Modérateur : Luis Román A RCINIEGA GIL , Enseignant-chercheur – UC de Lille
14h15
10 – La charge des aérosols dans l’atmosphère : Marianne MOLINER -DUBOST, Maîtresse de conférences en droit, IEA-EDP – Univ. Jean Moulin Lyon 3
14h45
11 – L’introduction de nouvelles entités artificielles dans l’environnement (la pollution) : Loïc PEYEN, Maître de conférences en droit, IEJUC – Univ. Toulouse Capitole
15h15-15h35 – Pause
SESSION V – SESSION CONCLUSIVE
15h35
12 – Sanctionner le dépassement des limites : Arnaud GOSSEMENT , Avocat, Professeur associé – Univ. Paris 1 Panthéon-Sorbonne
16h05-16h35
13 – Propos conclusifs : Magali DREYFUS, Chargée de recherche en droit CNRS, CERAPS – Univ. Lille et Grégory SALLE , Directeur de recherche en sociologie CNRS, CLERSE – Univ. Lille
16h35-17h15 – Discussion et fin du colloque
Cette journée d'études est soutenue dans le cadre de l'AAP Inter-MSH 2019-2020, qui fait suite à l'obtention d'un soutien de la MESHS dans le cadre de l'AAP Partenariat 2020-2021 (projet CRIMENV).
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