De nombreux projets économiques et sociaux sont menés à bien par des groupes d'agents qui coopèrent afin d'atteindre un objectif commun. La question de la juste redistribution de la valeur produite par leur coopération se pose. La théorie des jeux coopératifs fournit un cadre analytique adapté pour traiter formellement cette question. Un jeu coopératif permet de résumer les informations concernant les valeurs produites par la coopération d'un groupe d'agents. Ces agents peuvent se coaliser de manière à coordonner leurs actions et coopérer pour mener à bien leur projet commun. Le problème à résoudre se pose dans les termes suivants : comment redistribuer de façon juste le fruit de leur coopération en tenant compte de la capacité de chaque coalition à atteindre l'objectif commun?
La théorie des jeux coopératifs fournit plusieurs solutions à ce problème d'allocation de ressources. La solution de Shapley Shapley (1953), est bien établie dans la littérature. Elle a reçu un grand nombre d'applications. Par exemple, Littlechild and Owen (1978) l'utilisent pour répartir les coûts des appels téléphoniques longue distance. Elle s'interprète de la manière suivante : supposons qu'un agent se joigne à une coalition déjà formée. La contribution de l'agent à la coalition qu'il rejoint est mesurée par les variations de la valeur produite par la coalition suite à son entrée. La valeur Shapley attribue à chaque joueur la moyenne de ses contributions marginales aux coalitions auxquelles il peut se joindre.
Ju et al. (2007) remettent en question ce mode de rétribution. En effet, lorsqu'un agent se joint à une coalition, il empoche l'intégralité du surplus produit par son entrée dans la coalition. Or ce surplus est généré par la coopération entre ces deux entités, et non simplement par le joueur entrant. Ju et al. (2007) construisent un processus de rétribution reposant sur un mécanisme de négociation du surplus entre la coalition, il négocie avec celle-ci le partage du surplus produit par sa coopération avec cette coalition. Ju et al. (2007) supposent que la négociation entre les deux parties mènera au partage suivant : le joueur sortant empochera la moitié du surplus, laissant à la coalition restante le soin de répartir la moitié restante entre ses joueurs. L'objectif de notre groupe de travail est de proposer des processus de négociation entre la coalition et le joueur entrant un peu plus élaborés.
Pour cela, nous souhaitons nous inspirer des travaux dans la lignée de ceux initiés par Davis et Davis and Maschler (1965). Ils se concentrent sur le concept de jeu réduit. C'est un jeu dérivé du jeu original qui reflète la compréhension qu'ont les joueurs de la situation de jeu dans laquelle ils se trouvent et de leurs attentes du jeu. Ces attentes sont exprimées comme des prétentions sur les richesses à allouer, elles sont calculées sur la base du jeu original et constituent un argument dans la négociation en cours. Dans un travail célèbre basé sur le concept de jeu réduit, Sobolec (1975) a pu caractériser le nucléole qui s'apparente à une distribution à la Rawls. Par la suite, d'autres travaux ont suivi cette voie en la diversifiant dans différentes directions.
URI/Permalink: