Projet DPHC : La démocratie participative. Aspects historiques et contemporains
Université Lille 3, CERIES (anciennement GRACC).
Séminaire organisé dans le cadre d'une recherche collective (projet CPER 2009-2010) financée par la Maison européenne des sciences de l'homme et de la société (MESHS) et le laboratoire Gracc-Ceries (Université Lille 3).
Coordonné par Marion Carrel et Paula Cossart (Lille 3/Gracc-Ceries), avec Maryse Bresson (UVSQ, Printemps), Milena Doytcheva (Lille 3/Gracc-Ceries), Nina Eliasoph (University of Southern California), William Keith (Wisconsin-Milwaukee University), Rémi Lefebvre (Université de Reims/CERAPS Lille 2), Magali Nonjon (Université d'Avignon/CERAPS Lille 2), Julien Talpin (Paris 8/CSU).
L'objectif de ce séminaire est de développer les échanges sur les dispositifs participatifs présents et passés, et notamment de :
- repérer les moments dans l'histoire où l'accent est mis sur la participation citoyenne sous forme délibérative, et comprendre les raisons de ce phénomène
- mettre au jour les similarités et différences entre la situation en France et aux Etats-Unis
- analyser le rôle assigné au citoyen à travers la mise en place des dispositifs participatifs, depuis la canalisation des masses, jusqu'à la recherche d'un véritable contre-pouvoir citoyen, approfondissement de la démocratie.
Le séminaire est ouvert à toutes les personnes intéressées.
Résumé du projet
Le projet de recherche porte sur les expériences délibératives et participatives passées et contemporaines. Il s'articule autour de trois questions : les effets concrets des procédures délibératives sur les acteurs, l'influence des instances délibératives sur la décision et enfin les liens de complémentarité et de concurrence entre les procédures délibératives et les autres formes d'action collective. Pour mettre en oeuvre ce programme, nous procéderons à une ethnographie politique et historique du déroulement des réunions délibératives et des actions participatives sur une série de terrains. Sur le versant historique, l'observation portera en France sur les diverses assemblées citoyennes de la 1e République, les réunions contradictoires de la 3e République et les clubs des 4e et 5e Républiques ; aux Etats-Unis sur le Forum Movement et la Civic Education du début du 20e siècle. Sur le versant contemporain, l'enquête portera sur des dispositifs à portée générale tels que les budgets participatifs ou les débats publics) et des dispositifs centrés sur les populations en difficulté sociale et les minorités ethniques (en France : Réseau capacitation, centres sociaux, conseil de résidents étrangers, correspondants de la HALDE ; aux Etats-Unis : Youth Programms). Enfin, au croisement de l'historique et du contemporain, une enquête collective portera sur l'expérience fondatrice de l'Alma-Gare, et ses prolongements contemporains à Roubaix. En parallèle, dans l'objectif de croiser l'historique et le contemporain, mais également les contextes français et américain, nous procéderons à la confrontation et la valorisation de nos enquêtes par le biais de comités de pilotage, d'un séminaire annuel, et enfin d'un colloque international et interdisciplinaire.
- Paula Cossart (In charge)
Groupe de Recherche sur les Actions et les Croyances Collectives (GRACC), - Marion Carrel
Groupe de Recherche sur les Actions et les Croyances Collectives (GRACC),
Programme 2008/2009 Programme 2009/2010
Lundi 13 octobre 2008 (10h30-12h30) salle B2.351 (Université Lille 3)
Historiciser les expériences délibératives : les "forums" comme lieux d'éducation civique dans l'histoire des Etats-Unis
Invité : William Keith, Professeur en communication, Wisconsin-Milwaukee University, Etats-Unis. (Présentation de l'auteur par Paula Cossart)
L'idée que la délibération des citoyens assemblés peut compléter efficacement les institutions représentatives s'est-elle fait entendre à d'autres périodes de notre histoire ? Quelles expériences concrètes peut-on repérer dans le passé dans lesquelles on retrouverait une promotion du débat populaire ? Telles sont les questions auxquelles s'est intéressé William Keith. Il a montré qu'un « paradigme de la discussion » a émergé aux Etats-Unis au début du XXe siècle parmi les études académiques et pédagogiques de communication, sous l'influence notamment des écrits de philosophie pragmatique de John Dewey. Il a ensuite décrit comment les idéaux de la discussion en sont venus à prendre forme dans les années 1920 et 1930 dans diverses formes de « forums publics », lieux d'éducation civique.
William Keith est l'auteur de Democracy as Discussion: The American Forum Movement and Civic Education, Rowman and Littlefield, Lexington Books, 2007.
Vendredi 12 décembre 2008 (10h30-12h30) salle B2.351
Le nouvel esprit de la démocratie. Actualité de la démocratie participative
Invité : Loïc Blondiaux, Professeur en science politique, Université de Paris 1, Centre de Recherches Politiques de la Sorbonne. (Présentation de l'auteur par Marion Carrel)
Une nouvelle demande de participation se fait jour dans les démocraties. Sous des formes variées (blogs, forums, journalisme participatif, conférences de consensus, concertations...), elle exprime une insatisfaction à l'égard de la démocratie représentative comme de ses médiations traditionnelles. Comment donner corps à ce « nouvel esprit de la démocratie » sans succomber aux faux-semblants d'une rhétorique de la proximité ? Comment faire vivre cet impératif de participation des citoyens sans sortir du cadre de la démocratie représentative ? Comment penser les dispositifs susceptibles de réaliser ce nouvel idéal ?
Loïc Blondiaux est l'auteur de Le nouvel esprit de la démocratie. Actualité de la démocratie participative, Seuil, coll. « La République des idées », 2008 et de Le débat public : une expérience française de démocratie participative, La Découverte, 2007 (en co-direction).
Lundi 26 janvier 2009 (10h30-12h30) salle B2.351
« Ce que participer veut dire » : l'apport de la sociologie des professionnels de la participation dans l'étude du phénomène participatif
Invitée : Magali Nonjon, Maîtresse de conférence en science politique, Université d'Avignon, Centre d'Etudes et de Recherches Administratives, Politiques et Sociales (Présentation de l'auteure par Marion Carrel)
En s'appuyant sur les résultats d'une recherche doctorale menée sur l'émergence et la consolidation en France d'un véritable marché professionnel autour de l'animation et de la gestion des procédures participatives, c'est avant tout une sociologie de ce milieu que l'auteur présentera dans cette séance : qui sont ces acteurs ? Comment deviennent-ils « professionnels de la participation » ? Quelles sont leurs pratiques ? Quelles conceptions promeuvent-ils de la participation dans les dispositifs qu'ils inventent et/ou qu'ils animent ? Néanmoins, au-delà de la simple étude des trajectoires de ces acteurs, ce sont bien les effets de cette professionnalisation sur les conceptions mêmes de ce que « participer veut dire » qui seront interrogés. Ainsi, c'est le glissement progressif généré par ce processus de professionnalisation au fil duquel la participation a fini par n'être plus définie que par ses procédures plus que par ses effets sur les rapports sociaux et politiques qui sera analysé. Il s'agira notamment de montrer comment se dessinent derrière ce mécanisme quelques-unes des évolutions contemporaines des dispositifs participatifs : le développement de références à la responsabilité individuelle, l'émergence d'une vision pour le moins méfiante des habitants, l'exclusion des associations, la valorisation du vécu et de l'expérience comme stratégie de contournement des enjeux de pouvoir, ou encore la confusion entre médiation et engagement militant.
Magali Nonjon est l'auteure de Quand la démocratie se professionnalise. Enquête sur les experts de la participation (thèse de doctorat en science politique, Université Lille 2, 2006) et « Professionnels de la participation : savoir gérer son image militante », Politix, 2005.
Vendredi 13 mars 2009 (10h30-12h30) salle B2.351
Comment faire l'histoire de la participation ?
La disparition et le retour du tirage au sort.
Invités : Yves Sintomer, Professeur en sociologie, Université de Paris 8, Directeur adjoint du Centre Marc Bloch, Berlin (Présentation de l'auteur par Julien Talpin)
Yves Sintomer est l'auteur de Le pouvoir au peuple. Jurys citoyens, tirage au sort et démocratie participative (La Découverte, 2007) ; avec Carsten Herzberg et Anja Röcke, Les budgets participatifs en Europe. Des services publics au service du public (, La Découverte, 2008) ; avec Marie-Hélène Bacqué (dir.), La démocratie participative : histoires et généalogies (La Découverte, à paraître en 2009).
Vendredi 03 avril 2009 (10h30-12h30) salle B2.351
Un peuple spectateur ? La démocratie athénienne en questions
Invitée : Noémie Villacèque, ATER en histoire, Université de Provence. (Présentation de l'auteure par Paula Cossart)
Dans l'Athènes des Ve et IVe siècles avant J.-C., le peuple est souverain : assemblés en masse sur la colline de la Pnyx, les citoyens délibèrent et votent. Comment expliquer alors la prégnance, dans les textes de cette époque, de l'image d'un peuple-spectateur ? Ce lieu commun n'est pas le reflet d'une quelconque réalité historique correspondant à la notion moderne d'apathie politique. Car, même lorsqu'ils assistent à des représentations dramatiques, les citoyens ne sont ni passifs, ni silencieux : les poètes transforment bien souvent le spectacle en délibération, jouant ainsi avec la similitude entre les espaces d'assemblée et le théâtre. Celle-ci rend plus évidente encore, aux yeux des Athéniens, l'analogie entre les assemblées politiques et judiciaires et les assemblées dramatiques. Stigmatisée par les adversaires du régime athénien à la fin du Ve siècle, la mise en représentation du politique sera ensuite progressivement assumée.
Noémie Villacèque est l'auteure de Théatai logôn. Histoire de la démocratie comme spectacle: politique et théâtre à Athènes à l'époque classique (thèse de doctorat en histoire, Université de Toulouse le Mirail, soutenance en 2008).
Lundi 18 mai 2009 (10h30-12h30) salle B2.351
Pratiques de citoyenneté ordinaire et dynamique participative régionale
Invités : Bernard Eme, Professeur de sociologie à Lille 1, et Judith Hayem, Maîtresse de conférence en anthropologie à Lille 1, membres du Centre Lillois d'Etudes et de Recherches Sociologiques et Economiques (Présentation des auteurs par Rémi Lefebvre)
Aux lisières de ce qui est d'ordinaire considéré comme les champs d'exercice de la citoyenneté - la participation concrète aux affaires publiques -, aux lisières de la citoyenneté entendue aussi dans les mobilisations collectives, les mouvements sociaux ou contestataires au regard du miroir possible du désengagement militant, l'équipe de chercheurs du Clersé/Lille 1 porte le regard sur des pratiques de citoyenneté pratique, ordinaire, sur différents terrains du Nord-Pas-de-Calais (journaux citoyens, scènes de slam, association Choeurs de fondeurs). Leur hypothèse principale est que ce sont à travers ces pratiques plurielles et dans ces espaces souvent intermédiaires que se déploie une citoyenneté en quête de reconnaissance.
- Bernard Eme est l'auteur de Généalogie de l'appartenance déliée. Insertion et société, mémoire d'habilitation à diriger des recherches, Université Paris Dauphine, 2007 ; et de « Gouvernance territoriale, puissance publique et société civile », in Klein J.-L., Harrisson D. (dir.), L'innovation sociale. Emergence et effets sur la transformation des sociétés, Québec, Presses de l'Université du Québec, 2007.
- Judith Hayem est l'auteure de La figure ouvrière en Afrique du Sud, Paris, IFAS-Karthala, 2008 et de « Metaleurop : du défensif au créatif. Chronique et analyse d'une lutte singulière », (avec D. Corteel et A. Duhin), communication aux 11èmes journées internationales de sociologie du travail, Londres, 20- 22 juin 2007.
Ils font partie de l'équipe de recherche Clersé/Lille 1 lauréate de la consultation de recherche « Citoyenneté urbaine » du Puca, Ministère de l'écologie, énergie, développement durable et aménagement du territoire, 2007-2009.
Mardi 26 mai 2009 (10h30-12h30) salle B2.351
Empowerment talk
Invitée : Nina Eliasoph, Professeure de sociologie à University of Southern California, Los Angeles (Présentation de l'auteure par Paul Cary)
In the United States of America, public policies often aim to promote grassroots volunteering. In this context, voluntary organizations develop what Nina Eliasoph call "Empowerment Talk" : a constellation of ideals and speech about organizations being grassroots, local, participatory, egalitarian, multicultural, get people "out of their boxes" and to celebrate their cultural traditions, and to be not hierarchical, not based on distant experts' knowledge. Nina Eliasoph's analyses what happens to such ideas in the organizations in which they typically are used : organizations that are designed to "devolve" the state, to outsource the provision of social services to non-governmental organizations.
Nina Eliasoph est l'auteure de Avoiding Politics. How Americans produce apathy in everyday life (Cambridge, Cambridge University Press, 1998) et Managing the Spirit: Youth Programs and the Plug-In Volunteer (à paraître en 2009). Traduite en français : Nina Eliasoph, 2003, « Publics fragiles. Une ethnographie de la citoyenneté dans la vie associative », trad. par Daniel Cefaï, in Cefaï D. & Pasquier D. (dir.), Les sens du public. Publics politiques, publics médiatiques, Paris, PUF, p. 225 - 268.
Mercredi 27 mai 2009 (14h - 17h) salle B2.351
Atelier sur la pratique de l'ethnographie
par Nina Eliasoph, Professeure de sociologie à University of Southern California, Los Angeles.
Nina Eliasoph animera une séance d'atelier à partir de notes de terrain accumulées par les chercheurs et étudiants intéressés.
Lundi 15 juin 2009 (10h30-12h30), salle B2.351
"La participation entre injonction politique, action publique, mobilisation",
par Maryse Bresson, Professeure de sociologie, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, Laboratoire Printemps (Présentation de l'auteure par Paula Cossart).
Maryse Bresson prend appui sur ses travaux menés dans le monde des centres sociaux associatifs dans le Nord de la France pour insister sur la dimension « sociale » de la participation : en effet, ce terme ne désigne pas seulement l'organisation de réunions publiques, dans une conception « politique » qui assimilerait démocratie participative et délibérative. La participation désigne aussi une aspiration des corps intermédiaires, et notamment des associations, d'être associés aux décisions locales ou simplement, de voir reconnu leur rôle dans l'organisation du quotidien.. L'auteure propose de revenir sur cette idée, très présente dans la rhétorique de la politique de la ville, et d'interroger les liens entre injonction politique, action publique et mobilisation.
Maryse Bresson a publié sur ces questions «La participation des habitants contre la démocratie participative dans les centres sociaux du Nord», Déviance et société, 2004, Vol 24, n°1 et «Participation et lien social comme moteurs de l'intervention dans les 'quartiers sensibles' en France» in Baillergeau Evelyne, Bellot Céline (dir), Les transformations de l'intervention sociale : entre innovation et gestion des nouvelles précarités, Presses Universitaires du Québec, 2007.
Programme 2008/2009 Programme 2009/2010
Lundi 16 novembre 2009 (10h30-12h30) salle B2.351
"Une reconnaissance paradoxale. Ethnicité et participation dans les politiques de la ville"
Invitée : Milena Doytcheva, maître de conférences en sociologie (Lille 3 / Gracc-Ceries) (Présentation de l'auteure par Julien Talpin)
Cette présentation se propose d'explorer les manières dont l'appel à « la participation des habitants », devenu un leitmotiv des politiques publiques des dernières années, a constitué aussi en France une « politique indirecte » de gestion de l'ethnicité. Quand le credo républicain de « la cécité aux origines » constitue ici un obstacle à la reconnaissance politique du pluralisme ethno-religieux et culturel, le thème de la participation a été mobilisé comme la possibilité d'une synthèse renouvelée entre identités particulières et vivre-ensemble. Ce sont ces formes pratiques et symboliques de prise en charge et de régulation publique de l'ethnicité que la présentation se propose d'interroger à partir d'une enquête menée dans deux villes de la région parisienne auprès de responsables associatifs, d'élus et de professionnels sociaux. Ces résultats seront l'occasion de questionner les formes particulières que prennent les politiques participatives en France tant lorsqu'elles sont menées au titre de la démocratie locale que du souci d'une action publique « rénovée ».
Milena Doytcheva est maître de conférences en sociologie à l'Université de Lille 3 - GRACC, CERIES. Ces travaux portent sur la prise en compte de l'ethnicité dans les politiques publiques en France et en Europe. Elle est l'auteure de Le Multiculturalisme (La Découverte, 2005, coll. « Repères »), Une discrimination positive à la française ? Ethnicité et territoire dans les politiques de la ville (La Découverte, 2007, coll. « Alternatives sociales »).
Lundi 14 décembre 2009 (10h30-12h30) salle B2.351
"L'expérimentation de la participation à l'Alma Gare au cours des années 1970. Utopie politique ou contrainte sociale ?"
Invité : Thibault Tellier, Maître de conférences en Histoire contemporaine (Université Lille III, IRHIS) (Présentation de l'auteur par Maryse Bresson)
Avec les groupes d'action municipale (GAM) mis en oeuvre en particulier à Grenoble par Hubert Dubedout à partir de 1965, l'expérience de l'Atelier populaire d'urbanisme (APU) de l'Alma Gare à Roubaix, initiée au cours des années 70, est invariablement mentionnée lorsqu'il s'agit de retracer la préhistoire de la participation des habitants en France. Tout aussi souvent, cette expérience est également citée lorsqu'il s'agit de restituer le champ chronologique de la Politique de la Ville. A ce titre, l'épisode de l'Alma Gare semble tout autant appartenir au registre de la recomposition des politiques publiques destinées à la réhabilitation urbaine, qu'à la remise en cause des registres d'intervention militante dans les quartiers populaires. Au-delà de l'événementiel lui-même, il s'agit aussi pour l'historien d'appréhender un champ de recherches encore mal connu de notre discipline, celui de l'histoire de la participation à la fin des Trente Glorieuses. Cette histoire plonge en effet ses racines beaucoup plus en amont et, de fait, se trouve bien à la confluence de deux histoires parallèles : celle de la recomposition des modes d'intervention de l'État et celle des formes de militantisme en milieu urbain.
Maitre de conférences en Histoire contemporaine à l'Université Lille III, Thibault Tellier est l'auteur de l'ouvrage Le temps des HLM 1945-1975. La saga urbaine des Trente Glorieuses, (Autrement, 2007). Il prépare une habilitation à diriger des recherches consacrée aux origines historiques de la Politique de la Ville et plus spécialement au dispositif Habitat et Vie sociale.
Lundi 25 janvier 2010 (10h30-12h30) salle B2.351
"L'apport de l'anthropologie aux recherches sur la démocratie participative"
Invitée : Catherine Neveu, Directrice de recherche, Laboratoire d'anthropologie des institutions et des organisations sociales (LAIOS, IIAC, CNRS-EHESS) (Présentation de l'auteur par Marion Carrel)
Les travaux sur la « démocratie participative » sont nombreux, qu'il s'agisse d'en décrire et analyser les modalités de mise en oeuvre, les effets sur les appareils politiques ou les administrations locales, ou, moins souvent sur ceux qui y participent. Il s'agira dans cette présentation, à partir de recherches menées entre autres à Roubaix, d'analyser ce que peut apporter un regard anthropologique sur ces pratiques ; on abordera tout particulièrement la question des effets de catégorisations des publics.
Catherine Neveu est l'auteure de Citoyenneté et espace public. Habitants, jeunes et citoyens dans une ville du Nord, Lille, Editions du Septentrion, 2003 et a coordonné les ouvrages suivants : Anthropologie et Sociétés, numéro 33/2 thématique « Citoyennetés », avec N. Gagné, 2009 ; Les intermittences de la démocratie. Formes d'action et visibilités citoyennes dans la ville, en collaboration avec Marion Carrel et Jacques Ion, Paris, L'Harmattan, 2009 ; Cultures et pratiques participatives : perspectives comparatives, Paris, L'Harmattan, 2007 ; Anthropologica. Revue Canadienne d'Anthropologie, numéro thématique « La démocratie participative locale entre gestion et politique » (revue bilingue français-anglais), Vol. 50, n° 2, 2008.
1er mars 2010 (10h30-12h30) salle B2.351
"Les conflits de mémoire et les débats sur le passé peuvent-ils se gérer par des forums hybrides ?"
Invité : Nicolas Offenstadt, Maître de conférences d'histoire médiévale (Université Paris I) (Présentation de l'auteur par Paula Cossart)
Nicolas Offenstadt étudie les pratiques de la guerre et de la paix au Moyen-Age et lors de la Première Guerre Mondiale. Il a publié récemment Faire la Paix au Moyen Âge (Odile Jacob, 2007), La Grande Guerre en 30 questions (Geste, 2007), L'Histoire bling-bling. Le retour du roman national (Stock, Parti pris, 2009). Nicolas Offenstadt participe aux activités du CRID 14-18 (Collectif de recherche international et de débat sur la guerre de 1914-1918) et du CVUH (Comité de vigilance face à aux usages publics de l'histoire).
Lundi 15 mars 2010 (10h30-12h30) salle B2.351
"Pratiques de citoyenneté ordinaire et dynamique participative régionale"
Invités : Bernard Eme, Professeur de sociologie à Lille 1, et Judith Hayem, Maîtresse de conférence en anthropologie à Lille 1, membres du CLERSE, Centre Lillois d'Etudes et de Recherches Sociologiques et Economiques (Présentation des auteurs par Rémi Lefebvre)
Aux lisières de ce qui est d'ordinaire considéré comme les champs d'exercice de la citoyenneté - la participation institutionnalisée, quelles que soient ses formes, aux affaires publiques -, aux lisières de la citoyenneté entendue aussi dans les mobilisations collectives, les mouvements sociaux ou contestataires au regard du miroir sans doute plus que déformant possible du désengagement militant, l'équipe de chercheurs du Clersé/Lille 1 porte son regard, tout à la fois sociologique et anthropologique, sur la « réappropriation de moyens d'expression » comme pratiques civiques d'interpellation dans l'espace public, d'interprétation du monde, ordinaire, de production esthétiques non représentatives et de construction de nouvelles lignes de fuite esthétique sur différents terrains du Nord-Pas-de-Calais (journaux, scènes de slam, association Choeurs de fondeurs, associations d'appui aux musiques actuelles). L'hypothèse principale est que ce sont à travers ces pratiques plurielles et dans ces espaces, souvent intermédiaires et peu visibles, que se déploient des approches du rapport à la cité qui ne demandent pas une reconnaissance institutionnelle, mais la légitimité de leurs approches subjectives et collectives comme résistance au monde politique tel qu'il est dans son exigence de servitude.
Ces pratiques, non sans difficultés, non sans obstacles institutionnels n'ont plus de grandioses visées, elles sont avant tout résistances patientes à ce qui voudrait les asservir. La créativité est leur désir. On peut les prendre en défaut de vigilance sociétale, mais elles n'en demeurent pas moins dans les multiples lisières qui parsèment nos sociétés. Ailleurs, dedans et dehors. Cette ambivalence des lisières devient un objet sociologique.
Bernard Eme est l'auteur de Généalogie de l'appartenance déliée. Insertion et société, mémoire d'habilitation à diriger des recherches, Université Paris Dauphine, 2007 ; et de « Gouvernance territoriale, puissance publique et société civile », in Klein J.-L., Harrisson D. (dir.), L'innovation sociale. Emergence et effets sur la transformation des sociétés, Québec, Presses de l'Université du Québec, 2007.
Judith Hayem est l'auteure de La figure ouvrière en Afrique du Sud, Paris, IFAS-Karthala, 2008 et de « Metaleurop : du défensif au créatif. Chronique et analyse d'une lutte singulière », (avec D. Corteel et A. Duhin), communication aux 11èmes journées internationales de sociologie du travail, Londres, 20- 22 juin 2007.
Lundi 19 avril 2010 (10h30-12h30) salle B2.351
"Pourquoi les conseils régionaux souhaitent-ils plus de « participation » ? Institutionnalisation et politique de la démocratie participative "
Invité : Guillaumes Gourgues, doctorant en science politique, UMR PACTE - IEP Grenoble (Présentation de l'auteur par Julien Talpin)
Cette séance visera à explorer la question du « recours » à la démocratie participative émanant des institutions publiques, en s'appuyant sur l'analyse de l'engouement récent - puisque remontant essentiellement aux élections de mars 2004 - des conseils régionaux français pour le thème de la démocratie participative. Au-delà des logiques de protection du champ politique, d'activité des réformateurs ou d'alignement sur une prétendue norme, l'étude comparée de quatre groupes d'acteurs régionaux assurant la promotion de la démocratie participative au sein de leur institution ouvre la voie à une prise en compte systématique de la relation consubstantielle existant entre institutionnalisation (au sens de « mise en administration ») de la participation citoyenne et projets politiques alimentant les « objectifs » de celle-ci.
Guillaume Gourgues est doctorant en science politique (UMR PACTE - IEP Grenoble). Sa thèse (en cours de rédaction) porte sur l'analyse comparée de l'avènement d'une action publique régionale en faveur de la démocratie participative entre 1986 et 2008, dans quatre régions françaises (Bourgogne, Ile-de-France, Nord-Pas-de-Calais, Rhône-Alpes). Il travaille également sur les mobilisations (mouvements contemporains de précaires, grèves plus anciennes d'ouvriers).
Lundi 7 mai 2010 (10h30-12h30) salle B2.351
"La participation à la délibération dans les assemblées des cités grecques (VIII-Vème s. av. J.C.) : quelle réalité?"
Invitée : Françoise Ruzé, professeure émérite d'histoire grecque à l'Université de Caen (Présentation de l'auteure par Paula Cossart)
À la suite du beau travail présenté dans le séminaire l'an dernier par N. Villacèque sur les assemblées athéniennes du Vème s., il convient de remonter dans le temps et d'élargir l'espace de l'enquête : d'Homère au Vème s., des bribes d'informations nous permettent de voir s'affirmer les assemblées délibératives et d'assister aux efforts réformateurs destinés à assurer et à encadrer la participation des citoyens. Y a-t-il vraiment un modèle grec de la participation à la décision politique ?
Françoise Ruzé est notamment l'auteure de Délibération et pouvoir dans la cité grecque: De Nestor à Socrate (Publications de la Sorbonne, 1997), d'une participation à un recueil de textes juridiques, Nomima I et II (avec H. van Effenterre ; Ecole Française de Rome-de Boccard, 1994 et 1995), d'un ouvrage récent sur Sparte (avec J. Christien ; A. Colin, 2007).
Lundi 7 juin 2010 (10h30-12h30) salle B2.351
"Vers une ethnographie comparée des pratiques participatives ? De Bruxelles à Los Angeles, d'Helsinki à Lyon"
Invités : Mathieu Berger, docteur en sciences politiques et sociales de l'Université Libre de Bruxelles, chercheur associé, au Centre d'Etudes des Mouvements Sociaux (CEMS/EHESS), et Eeva Luhtakallio, doctorante à l'Université d'Helsinki (Finlande) (Présentation des auteurs par Marion Carrel)
Cette séance vise à mettre en dialogue des recherches sur des expériences très diverses de participation, en Europe et en Amérique du Nord. Alors que « l'impératif participatif » semble s'imposer partout, se décline-t-il de la même façon d'un pays à l'autre ? Comment se traduit-il en pratiques ? Quelles injonctions créé-t-il pour le citoyen ? A partir de l'intervention de deux chercheurs ayant menés des travaux comparatifs, cette séance permettra d'interroger la légitimité, la pertinence et les conditions de possibilité d'une ethnographie comparée des pratiques participatives. Participer et délibérer signifient-ils la même chose ici et là ? Comment expliquer des différences pratiques ou herméneutiques sans tomber dans les travers du culturalisme ? A partir de l'observation des échanges dans des dispositifs participatifs à Bruxelles et L.A., Mathieu Berger a cherché à établir une comparaison des règles interactionnelles et des formes de compétences sollicitées, ici et là, chez des participants présents en leur titre de « simple citoyen ». Dans son étude d'ethnographie comparative, Eeva Luhtakallio analyse pour sa part les conceptions de la démocratie ainsi que les idées et aspirations concernant la représentation et la participation des acteurs militants et politiques finlandais et français dans deux contextes locaux.
Mathieu Berger est docteur en sciences politiques et sociales de l'Université Libre de Bruxelles. Sa thèse de doctorat, intitulée Répondre en citoyen ordinaire, consiste en une ethnographie de la communication en assemblée participative et cherche à isoler les conditions de performativité de prises de parole profanes dans des espaces de démocratie urbaine comme les Commissions Locales de Développement Intégré (CLDI) à Bruxelles. Invité en 2008-2009 à Los Angeles (UCLA) pour un séjour de recherche consacré à une enquête ethnographique au sein de treize « Conseils de voisinage » (Neighborhood Councils). Il travaille actuellement à la définition d'un dispositif d'ethnographie comparée appliqué aux modes de citoyenneté locale et aux « atmosphères de démocratie » qualifiant les dispositifs de développement urbain participatif en Belgique, en France et aux Etats-Unis.
Eeva Luhtakallio finalise actuellement sa thèse doctorale intitulée Politics of Democracy, Citizenship and the Public Sphere. Study of Local Civic Practices in Finland and France. Son travail propose une comparaison des pratiques politiques dans une perspective d'« anthropologie de l'Etat » : des actions militantes, des actes de justification médiatiques, des représentations visuelles, et des discours sur la démocratie et la citoyenneté, qui sont issus des perceptions de « la démocratie » des acteurs. Son projet post-doctoral reposera sur une comparaison ethnographique des pratiques associatives locales en Finlande, France, et aux Etats-Unis. Elle est l'auteur de Sukupuolten valtakunta (Genre, Politique, transformation et résistance dans les municipalités finlandaises, Vastapaino 2007), ainsi que de « Perceptions of Democracy in Helsinki and Lyon » (à paraître) et « Movement of the Jobless in Finland » (à paraître).