Le projet ESPA, s'inscrit à la croisée du programme de recherche « Travail et création » et de l'axe transversal « Epistémologie des SHS » de la MESHS. Centré sur la problématique de l'Esthétique des savoirs spatiaux, il s'empare de trois contextes du travail de (la) création contemporain, soit un contexte théorico-pratique : le « tournant spatial » des arts et des SHS ; un contexte politique : le développement territorial/urbain culturel contemporain ; et enfin, ce qui en découle logiquement, un contexte pluridisciplinaire : les multiples rencontres entre art et sciences de l'espace sous formes d'emprunts croisés ou d'actions collaboratives. Il vise à interroger en actes et en réflexivité la mise au régime scientifique de l'art et, inversement, la mise au régime esthétique des sciences de l'espace (géographie et sciences de l'ingénierie spatiale - architecture, urbanisme, aménagement).
L'équipe pluridisciplinaire qui porte ce projet, reconnaît dans les trois éléments de contexte présentés ci-dessus, d'une part, l'oeuvre des stratégies spatiales du Land Art étatsunien contre le monde de l'art institué et sa politique de marchandisation de l'objet d'art : soit 1- l'in situ qui fait du lieu une alternative à l'objet d'art ; 2- l'outdoor, autrement dit, l'en dehors des institutions muséales ; 3- le changement d'échelle de la forme artistique. Autant de stratégies qui, dans les années 1960-70, ont renforcé le principe spatial de l'oeuvre de l'art (pratiques et objets), jusqu'à constituer une matrice pour les arts contextuels et relationnels contemporains. Outre l'arrivée de l'art sur le terrain des sciences de l'espace, elle reconnaît dans ce contexte d'autre part, l'importance spécifique de la pratique graphique dans la fabrique de la géographie et des ingénieries spatiales. En conséquence, depuis la fin des années 1990, les entrecroisements des champs factuels mais aussi méthodologiques et théoriques de la géographie et de l'art donnent lieu non seulement à des emprunts formels et méthodologiques croisés, à des analyses réflexives en miroir sur la question spatiale et sa construction, mais aussi à des pratiques collaboratives, qui posent en retour des questions épistémologiques que l'équipe souhaite travailler.
Le projet propose d'abord de mettre en perspective critique et de discuter avec un point de vue théorique et épistémologique les trois approches de la question spatiale en art qui, selon l'équipe, orientent aujourd'hui cette rencontre interdisciplinaire : l'approche par l'objet d'art, l'approche par le lieu/l'espace d'art, l'approche par la pratique ou l'expérience artistique/esthétique. Le second mouvement du projet d'étude privilégie résolument l'approche par la pratique et l'expérience spatiales et place dans la perspective de celles-ci les objets et les lieux/espaces d'art.
Il organise la réflexion pluridisciplinaire autour des conséquences épistémologiques de l'hybridation théorico-méthodologique des pratiques artistiques et géographiques contemporaines, et les traverse d'une interrogation diachronique, pour poser la question de l'esthétique des savoirs spatiaux/géographiques contemporains et passés, et ouvrir une réflexion croisée sur le « régime scientifique » de l'art contemporain et, inversement, sur le « régime artistico-esthétique » des activités scientifiques. Il invite, ainsi, à un retour réflexif sur les objets du savoir spatial/géographique, à une pensée de la séparation ou au contraire de l'articulation des différents régimes identifiés (scopiques, haptiques, etc.) et, enfin, à une interrogation fondamentale sur la question de la discontinuité/continuité épistémique (savoir) et épistémologique (fabrique du savoir) entre disciplines de SHS et disciplines artistiques de terrain en matière de fabriques de savoirs spatiaux.
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