La SAPE ou les ambiguïtés des appropriations du vêtement européen au Congo (19e-20e siècle)

Cette conférence veut observer les différentes vies du vêtement occidental dans les deux Congos depuis la période coloniale. Si dans un premier temps, ces vêtements – et en particulier le costume trois pièces – sont recherchées par les Congolais comme des marchandises importées, rares et curieuses, ils sont rapidement imposés par la colonisation. C’est vrai dans les missions catholiques et protestantes où la conversion religieuse doit être rendue visible par l’adoption du vêtement occidental. C’est vrai aussi pour les « évolués », ces hommes choisis et formés par l’administration coloniale pour servir d’auxiliaires : incarner l’administration coloniale se fait en revêtant le costume des colons. Cependant, rapidement, nombre de jeunes urbains s’habillent avec une outrageuse élégance et pour tout dire mieux que les colons. Cette pratique de l’élégance, raillée et regardée avec condescendance comme une imitation enfantine, devient à partir des années 1920 inquiétante tant elle brouille les hiérarchies politiques et sociales et risque de saper les fondements du système colonial.

Manuel Charpy est historien, chargé de recherche au CNRS. Il dirige depuis 2019 le laboratoire InVisu (CNRS/INHA). Il est spécialisé en histoire de la culture matérielle et de la culture visuelle. Il travaille sur l’articulation entre cultures matérielles et identités sociales à l’âge industriel, en France, au Royaume-Uni, aux États-Unis et en Afrique occidentale et centrale. Il travaille en particulier sur l’histoire sociales des images, sur les techniques au quotidien, sur le monde des objets domestiques et ces dernières années sur l’histoire du vêtement et de la mode – histoire du commerce et de la consommation des vêtements de seconde-main, histoire de la confection, histoire du vêtement en situation coloniale et en particulier dans la région du Congo. Il a créé en 2015 la revue Modes pratiques, revue d’histoire du vêtement et de la mode.
Marjorie Meiss est maîtresse de conférences en histoire à l’Université de Lille. Ses travaux portent notamment sur l’histoire de la culture matérielle et de la consommation, l’histoire de la mode et des apparences vestimentaires.

En partenariat avec l’Ecole supérieure d’arts appliqués et textile