Le projet vise à renouveler la description et l'analyse de la question sociale déclinée en deux volets complémentaires : la question urbaine et la question du processus pénal. Il entend, plus précisément, étudier les logiques et les mutations du contrôle social des classes populaires à travers les situations des adolescents en se focalisant sur les conditions et sur les modalités de leur gestion territoriale, d'une part en contexte urbain (ouvert), d'autre part en milieu institutionnel (fermé) et carcéral.
Il s'agit d'engager une analyse de la question sociale en prenant appui sur deux espaces contrastés : la ville et ses quartiers stigmatisés d'une part, la prison et les lieux de placement pour jeunes d'autre part. Il s'agit d'interroger les problèmes contemporains de l'exclusion (sociale) et de l'enclavement (spatial) ainsi que les politiques publiques qui leur sont dédiées, dans deux configurations distinctes du point de vue de l'encadrement institutionnel : l'une définie par l'exercice d'une contrainte physique directe en milieu clos (la prison, les centres de placement pour mineurs), l'autre par des mécanismes de contrôle social plus indirects, plus diffus et plus fragmentés en milieu ouvert (la ville). Le projet de recherche entend également envisager la question de leurs « frontières » respectives et analyser les formes d'articulation de ces deux espaces.
Troisièmement, ce programme de recherche propose une combinaison inédite de plusieurs méthodes d'enquête en vue de créer des données quantitatives et qualitatives originales. Il fera appel à des observations directes (ethnographie urbaine et carcérale), des entretiens approfondis (pour partie dans une perspective de récit biographique), un croisement entre l'analyse documentaire et l'analyse statistique (constitution de corpus tirés du dépouillement de dossiers pénaux en France et au Brésil, d'une comparaison des flux de la justice des mineurs dans ces deux pays, de dossiers pénitentiaires individuels, l'analyse de plans architecturaux), au dépouillement des archives des institutions concernées par l'élaboration et la mise en oeuvre des politiques de rénovation urbaine à Bruxelles, Lille et Montréal. Il comporte également l'originalité de suivre un panel de jeunes qui seront interrogés à plusieurs reprises dans des espaces différents en fonction de leurs parcours judiciaire en France et au Brésil.
Les résultats attendus sont de trois ordres. Premièrement, la réalisation de publications dans des revues nationales et internationales de haut niveau scientifique, avec un effort particulier entrepris vis-à-vis de revues internationales, généralistes ou spécialisées dans la question urbaine ou pénale, sans oublier des médias de vulgarisation au-delà du champ scientifique. Deuxièmement, créer une synergie interdisciplinaire et internationale dans la recherche sur l'urbain et la déviance qui consoliderait l'investissement de l'équipe dans le Groupe européen de recherche sur les normativités (GERN, GDR-E CNRS). Troisièmement, renforcer les liens entre recherche et formation universitaire, via le Master 2 « Science politique et action publique » (spécialisation « politiques urbaines ») de l'université Lille 2, le nouveau Master « La ville : socio-anthropologie des espaces et des territoires » à l'université Lille 1 et la formation des cadres des personnels de la Protection judiciaire de la jeunesse (ENPJJ de Roubaix).
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