Le projet partenarial « Théâtre politique en diachronie » se décline en deux journées d'étude, conçues comme le lancement d'un ensemble de rencontres visant à réfléchir sur les notions, méthodes d'analyse et corpus du théâtre politique dans une perspective diachronique. Aujourd'hui, il s'avère en effet nécessaire, pour enrichir la recherche sur le sujet, de joindre à l'étude terminologique et à l'examen des méthodes scientifiques le développement de l'approche transhistorique associée à un décloisonnement disciplinaire.
Il s'agira ainsi, pour des chercheurs - antiquisants, médiévistes, modernistes et contemporanéistes -, appartenant à des disciplines diverses (histoire, lettres, arts du spectacle, sociologie, etc.) mais tous penchés sur le caractère politique du théâtre, de croiser leurs études sur des contextes historiques, géographiques et socioculturels différents afin d'élargir les champs personnels de connaissance, et d'interroger les notions permettant d'explorer ce type d'art, leur valeur pour diverses périodes. Ces deux journées inaugurales, organisées, pour favoriser la discussion, autour d'un nombre réduit de communications, porteront alors sur une première notion et, afin d'en approfondir l'approche, sur son articulation avec des composantes du théâtre, sélectionnées selon leur pertinence a priori pour éclairer celle-ci.
Pour commencer, nous nous consacrerons à la notion qui, polysémique, s'avère la plus englobante ou du moins transhistorique, et qui, en tant que telle, semble pouvoir introduire les autres : celle de « théâtre politique ». Les deux premières journées s'articuleront autour de cette notion confrontée à deux composantes du théâtre : le personnage et le lieu. Ces confrontations pourront déjà permettre, grâce au croisement des époques, contextes et corpus, d'affiner la notion de théâtre politique en abordant des notions-soeurs telles que « théâtre de propagande », « théâtre engagé », « théâtre populaire », et d'étudier la spécificité et la pertinence relatives des instruments d'analyse employés.
La première journée (vendredi 25 mai 2012) portera ainsi sur « théâtre politique et personnage ». Les questions sont multiples et diverses selon les contextes et genres : quel type de personnage donne au théâtre une portée politique, en fait un discours de type politique ? Toute représentation d'un personnage à caractère politique fait-elle pour autant de la pièce une oeuvre « politique », et inversement ? Quelle visée peut avoir le théâtre selon le type de personnage politique qu'il met en scène - caricature d'un individu précis, masque, allégorie, figure de chef ou de roi, type social... - et quelle est la compétence, culturelle, politique ou sociale, attendue du spectateur ? Ces questions, auxquelles d'autres s'ajoutent, furent posées dès l'Antiquité (Aristote par exemple, dans La Poétique 1451 b, distingue les figures individuelles des figures « générales »), et l'étaient encore aux XIXe et XXe siècles, à travers la vogue du « théâtre social », l'émergence du théâtre d'agit-prop ou de la dramaturgie brechtienne.
La deuxième journée (vendredi 15 juin 2012) portera sur « théâtre politique et lieu ». Sera ainsi interrogée la dimension politique d'une représentation sous l'angle de la localisation, de la délimitation et de la caractérisation de son lieu. Pour éclairer la notion, sera notamment traitée la question du lieu théâtral comme espace architecturé, structuré, comme espace de rassemblement - public, symbolique, etc. Le lieu spécifiquement théâtral de l'Antiquité grecque, bien que la plupart du temps distingué de l'agora, présentait, en ce sens, une dimension politique, qui alimente toujours les discours d'artistes contemporains. Toutefois, la question de l'appropriation, voire du détournement, de lieux non théâtraux ne sera pas oubliée, le rapport, de contradiction ou d'identité, entre le lieu de représentation, élu bien que non destiné au spectacle, et l'événement représenté paraissant lui aussi au coeur de l'articulation thématique « théâtre et politique ». Au XVe siècle, à une époque où les jeux étaient dépourvus d'une architecture propre, le choix du lieu de représentation était, en ce sens, porteur de messages politiques, et le rapport particulier de communication que ce choix générait se retrouve, en France, jusque dans les spectacles de rue des années 1960-1970.
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