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severine.casalis[at]univ-lille[POINT]frLes troubles développementaux du langage concernent d'une part le langage oral (Troubles Spécifiques du Langage ou TSL), d'autre part le langage écrit (dyslexie). Ces deux pathologies développementales sont étudiées, le plus souvent, de façon isolée. Environ 7% des enfants de moins de cinq ans présentent un trouble du langage. Pour beaucoup, il s'agit d'un retard qui se résorbera; pour d'autres, les troubles persisteront. De nombreux aspects du langage peuvent présenter des déficits (phonologie, lexique, syntaxe, etc.), mais aucune classification n'est pour l'instant consensuelle. On retient simplement la présence de troubles en production seulement (TSL expressifs) ou en production et compréhension (TSL mixtes). La prévalence de la dyslexie, quant à elle, est évaluée à 3-4%.
Paradoxalement, alors que des déficits dans le traitement du langage oral ont été mis en avant chez les dyslexiques, et qu'on sait que la grande majorité des TSL rencontreront d'importantes difficultés en lecture, peu de recherches ont étudié ces pathologies dans un cadre intégré. L'objectif du projet est double. Il s'agit d'étudier les liens entre troubles du langage oral et écrit (volet 1) et d'examiner la spécificité de ces troubles développementaux (volet 2). Le volet 1 poursuit lui-même deux objectifs. Le premier consiste à évaluer l'apprentissage de la lecture chez les enfants TSL, dans le cadre bien défini des recherches portant sur la lecture et ses troubles. Ainsi, on examinera le fonctionnement du système de reconnaissance de mots écrits à l'aide du modèle à double voie, dans une perspective comparant des groupes mais également dans une analyse multicas. Ce type d'approche permet de mettre en évidence différentes perturbations dans la mise en place du système de lecture et de les relier à des déficits cognitifs et linguistiques.
Le second objectif consiste à comparer les performances de sous-groupes de TSL et dyslexiques dans différents traitements linguistiques, essentiellement centrés autour du niveau lexical. Ainsi, la dénomination de mots sera étudiée chez les sous-groupes de TSL (opération 2). Afin d'examiner la qualité des représentations phonologiques sous-jacentes, les traitements phonologiques à l'oeuvre dans la reconnaissance auditive des mots seront évalués par des situations de décision lexicale dans lesquelles les stimuli seront plus ou moins proches des mots réels (opération 3). Deux opérations examineront le transfert intermodal, oral-écrit (opération 4) et écrit-oral (opération 5). L'objectif de ces opérations est d'examiner directement, d'une part, si les représentations phonologiques peuvent, notamment dans le cas des TSL bons lecteurs, bénéficier de l'information orthographique, d'autre part si les informations phonologiques peuvent être directement utilisées en situation de lecture. Afin d'évaluer la structure des connaissances sémantiques en mémoire, et de tester l'hypothèse d'effets différentiels selon le profil linguistique, l'activation de l'information sémantique sera évaluée via le paradigme d'amorçage. Plusieurs de ces opérations sont basées à la fois sur le recueil de données comportementales et électrophysiologiques. L'électroencéphalographie est en effet un outil puissant qui permet d'examiner très finement l'activation de différentes composantes dans le traitement du langage. Il s'agit en outre d'une méthode non invasive d'investigation de l'activité cérébrale ; à ce titre, elle peut facilement être utilisée auprès de populations sensibles.
Enfin, le dernier volet du projet concerne la spécificité des troubles du langage, en examinant de façon détaillée la présence de troubles praxiques dans l'analyse (production et reconnaissance) de gestes communicatifs et non communicatifs (opération 7).
Les résultats à l'ensemble des opérations devront permettre de dresser un tableau intégré des troubles développementaux du langage. Des différences sein des TSL sont attendues entre les sous-groupes de TSL, d'une part quant à la nature des troubles (expressifs vs mixtes), d'autre part, quant au caractère résorbé ou persistant des troubles sur les différents traitements évalués. On cherchera également à localiser les différences entre les dyslexiques et les différents groupes de TSL, de façon à rendre compte plus précisément des liens entre ces deux troubles développementaux du langage. Enfin, l'analyse des gestes communicatifs ou non communicatifs permettra d'examiner l'étendue des déficits chez les TSL, et plus généralement les liens entre langage et gestes.
L'ensemble de ces résultats devrait permettre une meilleure prévention des risques de difficultés d'apprentissage de la lecture chez les enfants ayant résorbé leurs troubles de langage, et une prise en charge plus ciblée des difficultés rencontrées à la fois dans le langage oral et dans l'apprentissage de la lecture.
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