9h30 à 10h30 : Harmoniser la polyphonie du réel, le chœur d’un lieu et d’une époque : entretien avec Camille Luscher et Clara Nizzoli
Deux textes où foisonnent les parlures et les registres de langues, et où sont reconstitués les lieux et époques par la compilation de témoignages.
Le Cycle de la Mort de Thomas Korovinis (Belleville éditions, 2022) nous plonge dans le Thessalonique en crise des années 60. Ce texte en forme de kaléidoscope sociétal agence neuf témoignages racontant la figure d’Aristos, orphelin marginal accusé à tort de meurtres retentissants. Par le portrait choral de ce coupable idéal nous est donné le panorama d’un pays en proie à l’injustice, à la corruption et aux relents fascistes. Clara Nizzoli viendra nous dévoiler les coulisses de sa traduction. Un travail où la complexité du contexte historique n’a d’égal que la subtilité des différents registres qui font résonner « la mémoire composite du peuple » ainsi que l’inventivité des différents sociolectes composant une langue.
Dans Ustrinkata (Quidam, 2020) c’est au comptoir d’un bistrot perché sur les Alpes suisses, que nous sommes invité·es à boire les paroles d’un village. Au cœur de l’hiver, avant que l’établissement ne ferme définitivement ses portes, les habitant·es viennent une dernière fois s’abreuver d’alcool et des histoires enfouies dans la mémoire du lieu. Une symphonie de dialogues ressourçant l’universel dans une oralité ultra-locale. C’est Camille Luscher qui a relevé avec brio le défi de traduire ce texte coloré par plusieurs dialectes romanches, au contact desquels l’auteur Arno Camenisch a grandi. Elle viendra nous raconter son travail d’imagination mais aussi de terrain, pour écouter et restituer la délicieuse impureté de cette langue.
Modération : Anne-Lise Remacle
En compagnie de Clara Nizzoli et Camille Luscher
Réservations
De 10h30 à 11h30 : Dégoupiller la langue, embrasser la tradition ou s’en défaire : un voyage dans l’aire dravidienne avec Léticia Ibanez et Dominique Vitalyos
Si une langue qui se délie peut dévoiler toute la vérité d’un être, elle peut aussi l’engager sur les chemins plus sinueux de la fiction, du fantasme, de la fabulation détonante. Deux auteurs dravidiens empruntent ces voies détournées.
Dans La Sterne Rouge (Zulma, 2022), Antonythasan Jesuthasan nous livre l’autobiographie fantasmée d’Ala, une Tigresse tamoule devenant terroriste dans un Sri Lanka ravagé par la guerre civile. À la croisée des genres, ce texte questionne l’attachement aux origines autant que l’ambition sans borne de son personnage à mener une vie libre et héroïque. C’est Léticia Ibanez qui a signé la traduction de ce récit tamoul où l’enchevêtrement de langues rivales et d’un idiome imaginé reflète le drame identitaire de l’héroïne.
En regard de ce texte baroque, Dominique Vitalyos viendra évoquer la magie émanant des douze nouvelles du Talisman (Zulma, 2012) de Vaikom Muhammad Basheer. Ce fabuleux conteur du milieu du XXème siècle nous plonge dans son Kerala natal et y dénonce subrepticement les injustices et les carcans des systèmes ancestraux. Cette rencontre sera l’occasion d’évoquer les nuances linguistiques et culturelles permutant entre le tamoul et le malayalam, les frontières et les passages entre ces deux langues jumelles et pourtant bien distinctes.
Modération : Anne-Lise Remacle
En compagnie de Léticia Ibanez et Dominique Vitalyos
Réservations
13h30 à 15h : Rencontre avec deux voix du Moyen-Orient : Ehsan Norouzi et Nasim Marashi
À l’invitation des éditions Zulma, Ehsan Norouzi et Nasim Mara’shi, deux figures reconnues du paysage littéraire iranien, mais quasiment inédites en français, viendront chacun·e évoquer leurs travaux dans lesquels les langues confrontées aux déplacements contraints ou volontaires occupent une place prépondérante.
Inscrivant sa démarche littéraire dans le pas de ses différents voyages, Ehsan Norouzi travaille actuellement à ce qu’il décrit comme une cartographie de la prose moderne iranienne. Traducteur de l’anglais, il nous donnera également un regard sur ce que cela signifie que de faire rayonner une certaine littérature occidentale dans son pays.
Après deux romans qui lui ont valu un succès, aussi bien en Iran qu’à l’étranger, Nasim Marashi travaille en France à la rédaction de son troisième texte à partir des nombreux entretiens qu’elle a menés avec les familles afghanes exilées dans différentes capitales européennes. L’autrice se fera ainsi l’écho de plusieurs générations de voix allophones exilées dans des cultures étrangères.
Modération : Dulia Lengema
En compagnie de Ehsan Nozouri et Nasim Marashi
Réservations
15h à 16h : Éditer, enseigner, traduire, transmettre les langues minorées : entretien avec Nathalie Carré et Laure Leroy
Nathalie Carré et Laure Leroy se sont trouvées lorsque la première a traduit pour le compte de Zulma, la maison dirigée par la seconde, deux romans de Kai Miller (L’authentique Pearline Portious en 2017, By the rivers of Babylon en 2019), auteur jamaïcain sondant les voix et les racines de son île d’origine.
Leurs retrouvailles pour notre festival sera l’occasion de revenir sur le parcours de ces deux chercheuses en langues rares et en voix singulières.
Deux trajectoires ou langage devient le paronyme rêvé de l’engagement, du désir à mettre en lumière et en dialogue les idiomes du monde entier, ceux en particulier dont l’exiguïté ne peut qu’être défendu dans le champ éditorial et universitaire dominant le monde occidental.
Modération : Dulia Lengema
En compagnie de Nathalie Carré et Laure Leroy
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16h à 17h : Des corps et d’esprit, traduire ce qui anime un corps dans un paysage : entretien avec Eric Boury et Jean-Baptiste Coursaud
En différents recoins de la Scandinavie, le désir trouve matière à s’épandre, et les corps, humains ou non, à se mouvoir dans une nature signifiante.
Chez Jon Kalman Stefansson, auteur phare de la littérature islandaise, c’est dans un fjord à l’ouest de l’île que le village anonyme de Lumière d’été et vient la nuit (Grasset, 2021) devient le théâtre d’une comédie vespérale. De menus détails dérèglent les sens, l’amour et la mort y creusent des abîmes dans des vies minuscules. Eric Boury, traducteur attitré de Stefansson, viendra dire ce qui le lie à cet auteur et à sa phrase au rythme si particulier.
D’abîme, il en est aussi question chez Tarjei Vesaas, trésor de la littérature norvégienne, dont une partie de l’œuvre vient d’être rééditée en français. Les Ponts (Cambourakis, 2021) esquisse le douloureux passage à l’âge adulte de Torvil et Aud, voisins depuis l’enfance, aux abords d’un ruisseau et d’une forêt où ils feront une découverte brisant leur bulle de quiétude et scellant un pacte irréversible. Vesaas, par sa prose extrêmement épurée, distribue la parole, manie les symboles et orchestre les déplacements dans un style qui semble n’appartenir qu’à lui. Jean-Baptiste Coursaud qui a retraduit plusieurs des textes depuis le néo-norvégien nous expliquera les enjeux de son travail.
Modération : Anne-Lise Remacle
En compagnie de Eric Boury et Jean-Baptise Coursaud
Réservations
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