Depuis le 18e siècle, les manières de définir la sexualité, mais aussi les configurations sociopolitiques et économiques au sein desquelles elle s’est inscrite, ont fortement varié. Dans sa définition même, la sexualité est labile : vue comme «naturelle», universellement connue, elle se dérobe en fait à l’analyse. Au-delà des difficultés définitionnelles et méthodologiques, les normes hiérarchisant les sexualités - et les individus - sont, elles-aussi, complexes et changeantes. Selon les régimes politiques, les espaces sociaux et les catégories sociales, certaines formes de sexualité sont valorisées et d’autres sont utilisées pour altériser des personnes et des groupes, voire les disqualifier socialement ou juridiquement. «Technique du soi» permettant de gouverner les corps et les esprits, la sexualité est de fait aussi un instrument de classement complexe utilisé par les institutions économiques et politiques, les groupes sociaux mais aussi les personnes pratiquantes ou spectatrices. À ce titre, comme tout instrument de pouvoir, outre qu’elle normalise et assigne, elle émancipe et crée des capacités d’action collective (mouvements féministes, homosexuels, LGBT, revendications de droits à la sexualité de personnes en situation de handicap, etc.). Prise comme terrain ou comme objet, la sexualité impose des réflexions épistémologiques, théoriques et méthodologiques qui sont encore en germination (du moins en France).
Le projet EpiSex a pour objectif de contribuer à alimenter ces réflexions dans le cadre de l’axe Épistémologie des SHS de la MESHS.
Ce projet est le résultat d’une dynamique impulsée avec les journées Sexualité(s) et enfermement en Europe organisées par Gwenola Ricordeau et Régis Schlagdenhauffen (11-12 décembre 2014, avec le soutien de l’université de Lille - sciences et technologies, du Clersé et du LabEx EHNE / Paris-Sorbonne). Ces journées ont en effet fait apparaitre l’importance d’ouvrir des questionnements à d’autres types de rapports sociaux (usages de la sexualité à des fins de résistance individuelle ou collective, par exemple) et d’espaces sociaux.
AXE 1 : Séminaire Épistémologie de la sexualité
Les six séances du séminaire « Épistémologie de la sexualité » visent, tout en faisant le point sur l’état de la recherche, à traiter et à confronter les polémiques scientifiques qui traversent et structurent les approches disciplinaires des sexualités. Le séminaire est structuré autour de trois enjeux scientifiques:
(1) Les types de définitions du sexuel dans les sciences humaines et sociales, mais aussi dans les sciences du vivant.
(2) L’objet sexuel et les contextes sociopolitiques et scientifiques.
(3) La sexualité et les studies.
AXE 2 : journée d'étude Discipliner le sexuel, juin 2017 (Lille)
Cette journée d’études met les considérations épistémologiques (mais aussi méthodologiques) de l’axe 1 et la confrontation des points de vue disciplinaires sur le sexuel à l’épreuve de terrains spécifiques donnant à voir des manières diverses dont le sexuel peut être discipliné. Au-delà des seuls lieux d’enfermement (prisons, camps, couvents, asiles, etc.), qui ont fait l’objet des journées «Sexualité(s) et enfermement» évoquées précédemment, on pense par exemple à des formes d’énonciation formelles de normes sexuelles, comme celles pouvant exister dans des organisations politiques (par exemple : Ricordeau, 2016), ou aux rites associés à la sexualité (enterrement de vie de célibataire, par exemple).
Le projet Episex reçoit le soutien de la MESHS dans le cadre de son soutien aux activités "de partenariat".
Il est également soutenu par le Clersé (université de Lille - sciences et technologies), le Ceries (université de Lille - sciences humaines et sociales) et l'Iris (EHESS, Paris)
Responsable scientifique du projet: Gwenola Ricordeau (université de Lille - sciences et technologies, Centre lillois d'études et de recherches sociologiques et économiques - Clersé)
URI/Permalink: https://www.meshs.fr/page/epistemologie_sexualite_penser_enqueter_sur_sexualite