« L'organisation de la connaissance en sciences sociales, particulièrement la sociologie, à la différence le plus souvent des autres sciences, est volontiers déterminée par des catégories de la pratique sociale ou politique. Ce constat vaut notamment pour la famille. La question peut être donc posée de savoir si, sur ce sujet précis, cette détermination n'est pas susceptible de produire des biais dans les approches choisies, dans les analyses proposées, dans les théories avancées. Nous donnerons quelques exemples de ces biais possibles. La question mérite d'être d'autant plus d'être posée ici que les enjeux que représente la famille pour le fonctionnement et la perpétuation des sociétés sont considérables. Nous tenterons de le démontrer. Si l'on considère alors que rien ne menace plus les observations et les instruments pour les entreprendre, les réflexions de sciences sociales sur la famille que l'idéologie, ne faut-il pas penser une catégorie de la connaissance qui serait différente de cette catégorie de la pratique qu'on appelle la "famille" ? » J. C.
Jacques Commaille est Professeur émérite de sociologie de l'École Normale Supérieure de Cachan. Il est membre de l'Institut des sciences sociales du politique. Il fut étudiant de Pierre Bourdieu, Raymond Aron et Jean-Claude Passeron. Il collabora avec Jean Carbonnier. Aujourd'hui spécialiste de sociologie politique du droit et de la justice, il s'attache à développer différents axes de recherches comme les processus politiques de production de la loi, le rapport entre justice et pouvoir politique, la place du droit dans le processus d'action publique, la dimension juridique des politiques publiques ou les régulations politiques et juridiques.
Ses objets de recherches plus particulièrement travaillés sont : la famille, le divorce ou la carte judiciaire.
Jacques Commaille défend l'idée selon laquelle la sociologie du droit n'est pas une spécialité de la sociologie générale, et par ailleurs que la recherche dans ce domaine ne doit pas être dictée par la demande. La sociologie politique du droit relève en effet pleinement de la sociologie générale, elle n'en est pas un sous-produit. Elle doit nécessairement rompre avec les nécessités des catégories de la pratique. L'objectif de cette démarche est de comprendre le sens de l'économie normative ou la régulation d'une société. Cela passe par la mise en rapport des facteurs sociaux, expressions du fonctionnement d'une société donnée, avec la production des normes et leur mise en oeuvre.
Parmi ses publications :
- (avec François Chazel) Normes juridiques et régulation sociale, Paris, LGDJ, 1991.
- Les Stratégies des femmes : travail, famille, politique, Paris, La Découverte, 1993.
- L'Esprit sociologique des lois. Essai de sociologie politique du droit, Paris, PUF, 1994.
- Misère de la famille, question d'État, Paris, Presses de Sciences Po, 1996.
- Les Nouveaux enjeux de la question sociale, Paris, Hachette, 1997.
- (avec Claude Martin) Les Enjeux politiques de la famille, Paris, Bayard, 1998.
- (avec Bruno Jobert) Les Métamorphoses de la régulation politique, Paris, LGDJ, 1999.
- (avec Laurence Dumoulin et Cécile Robert) La Juridicisation du politique : leçons scientifiques, Paris, LGDJ, 2000.
- Territoires de justice : une sociologie politique de la carte judiciaire, Paris, PUF, 2000.
- (avec Martine Kaluszynski) La Fonction politique de la justice, Paris, PACTE/La Découverte, 2007.
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